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EDITORIALChers lecteurs,
Il n'y a pas plus inéquitable que de traiter de la même manière des personnes dans des situations inégales.
Jusqu'à présent, les patients atteints de maladies rares étaient désavantagés par la société et par les politiques publiques, qui ne tenaient pas compte de la situation d'inégalité dans laquelle ils se trouvaient. Pour combler cette lacune, nous ne demandons pas que ces personnes bénéficient d'un meilleur accès aux soins que le reste de la population, mais simplement de mesures différenciées, qui compensent leur fragilité spécifique, pour leur offrir un accès égal à l'information, au diagnostic et aux soins.
Les personnes atteintes de maladies rares sont confrontées à une inégalité naturelle initiale : la faible prévalence de leur maladie, due à la rareté d'une malformation génétique ou d'une autre défaillance, qui induit des incapacités physiques, sensorielles et comportementales - des situations chroniques, souvent invalidantes, mettant en jeu le pronostic vital. Le poids social et économique s'ajoute à la vulnérabilité de la personne et de sa famille.
Or, le manque de politiques publiques ou leur caractère inadapté amplifient ces inégalités morales et politiques, compromettant l'accès aux meilleurs soins possibles comme à la justice sociale.
Cette aggravation des inégalités de santé par les politiques publiques s'explique par un égalitarisme de pure forme : au mieux, les patients se voient reconnaître des droits égaux, mais dans les faits ils n'y accèdent pas.
L'objectif du système de santé public est d'empêcher ces situations et d'améliorer le sort des populations confrontées à ces maladies, qui les font souffrir. C'est pourquoi ce système ne peut laisser aucun patient livré à lui-même, et doit corriger les inégalités nées de la rareté de ces maladies. Les politiques de santé publique doivent porter des valeurs de générosité, de responsabilité, de justice sociale et d'action. L'esprit de fraternité, dans une société, consiste à réduire les inégalités, tout en préservant les différences, précieuses. La santé publique ne doit pas faire exception à cette règle.
Pour atteindre cet objectif, nous devons adopter une stratégie à trois niveaux :
Des politiques de santé publiques fondées sur des mesures internationales, européennes et nationales au service de l'intérêt général. À l'échelon européen, ces politiques incluent : la politique de l'UE sur les maladies rares, sa stratégie en faveur des personnes handicapées, sa stratégie de réduction des inégalités de santé et la future directive européenne sur les soins de santé transfrontaliers et la mobilité des patients ;
Une politique de santé participative, qui s'appuie sur la communauté des patients atteints de ces maladies et mobilise toutes les personnes concernées par une même maladie ou un même groupe de maladies ;
Une politique de promotion de la santé, qui vise à réduire les inégalités sociales de santé en renforçant les capacités individuelles et collectives.
Yann Le Cam
Directeur général
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EN BREFLa Journée des maladies rares, c'est à la fin du mois !
Pour célébrer la Journée des maladies rares, EURORDIS organise un événement à Bruxelles le 28 février. Le colloque intitulé « Maladies rares et inégalités de santé en Europe » réunira les principaux acteurs du domaine des maladies rares pour réfléchir sur les inégalités de santé en rapport avec ces pathologies, et sur les moyens de les atténuer.
La conférence aura lieu au Centre de presse international à Bruxelles. Parmi les participants figureront des malades et des représentants de malades, des professionnels de santé des différents centres d'expertise sur les maladies rares, des chercheurs en sciences sociales et des universitaires spécialistes des maladies rares, les membres du Comité d'experts de l'UE sur ces pathologies, des représentants de l'industrie, ainsi que des hauts responsables de l'Agence européenne des médicaments et des Directions générales de la Santé et des Affaires sociales de la Commission européenne.
La conférence fera le point sur la situation des maladies rares en Europe et montrera les inégalités de santé qui existent, au travers d'études et d'enquêtes.
Si vous avez une histoire à raconter qui illustre les inégalités de santé auxquelles se heurtent les patients atteints de maladies rares, merci d'envoyer un courriel à :
rarediseasedaystories2011@eurordis.org Pour en savoir plus sur cet événement et sur les manifestations prévues dans votre pays à l'occasion de la Journée, rendez-vous sur :
www.rarediseaseday.org -------------------------
ARTICLESNouvelle enquête sur les maladies rares au Royaume-Uni
Les patients perdus dans le système« Je suis atteint d'une maladie génétique qui n'a été diagnostiquée que lorsque j'avais 42 ans, alors que j'ai été suivi régulièrement par un pneumologue dès l'âge de sept ans », explique un patient atteint de
dyskinésie ciliaire primitive qui a répondu à l'enquête. Il s'agit là d'un des nombreux témoignages alarmants recueillis par Rare Disease UK (
RDUK) dans le cadre de son enquête auprès des malades, qui brosse une image plutôt sombre de la situation des patients atteints de maladies rares. Retards et erreurs (souvent répétées) de diagnostic, grandes difficultés à obtenir des informations exactes, soutien insuffisant, médiocrité de la coordination des soins, manque de traitement efficace, incohérences en matière d'accès aux médicaments, manque d'information et de possibilités de participer à des recherches... Aucun des aspects de la vie des patients atteints de maladies rares n'est sorti indemne du rapport « Vivre avec une maladie rare : l'expérience des patients et des familles ».
RDUK a envoyé un questionnaire à tous ses membres (plus de 600) et de nombreuses associations de malades faisant partie de l’alliance nationale l'ont transmis à leurs propres membres. 570 réponses valides ont ainsi pu être recueillies, pour un total de 119 maladies rares. « Nous sommes tout à fait conscients des problèmes que rencontrent les personnes atteintes de maladies rares et leur famille au Royaume-Uni. Les témoignages que nous recueillons en permanence montrent que les patients sont tous confrontés au même genre de difficultés, quelle que soit la maladie dont ils sont atteints. En lançant cette enquête, notre but était d'obtenir un aperçu quantifiable de ces problèmes, qui puisse étayer nos arguments », déclare Stephen Nutt, qui travaille pour RDUK. À l'occasion de la Journée des maladies rares 2011, l'alliance nationale britannique publiera un rapport présentant ses recommandations pour mettre en place une stratégie sur les maladies rares au Royaume-Uni. « Nous avons mené cette enquête pour recueillir des éléments qui viennent documenter ce rapport, mais aussi pour disposer d'un outil fondé sur l'expérience des malades, qui nous aide à sensibiliser l'opinion publique aux problèmes rencontrés par les patients et leur famille. »
Le rapport de l'enquête, largement diffusée dans un objectif de sensibilisation, a bénéficié d'une excellente couverture médiatique. Aucune étude d'une telle portée n'avait encore été menée au Royaume-Uni. Les réponses des malades et de leurs familles témoignent d'une grande frustration et de nombreuses attentes. « Ce qui est particulièrement inquiétant, c'est que la majorité des participants à l'enquête sont en contact avec une association de malades et que beaucoup d'entre eux ont accès à des services spécialisés dans leur maladie. Or, il existe sans aucun doute de nombreux autres patients qui sont complètement perdus dans le système et ne bénéficient d'aucun soutien. J'ai bien peur qu'en réalité, la situation soit pire que ce que suggère l'enquête », affirme Stephen Nutt. Le sentiment d'isolement face au système revient fréquemment dans les réponses des malades, qui doivent souvent faire de longs trajets pour consulter plusieurs spécialistes dans différents hôpitaux et répéter leur histoire à longueur de temps. « A 18 ans, on nous fait passer du service pédiatrique au service pour adultes et à ce moment-là, on se retrouve livré à soi-même. Par exemple, dans le service pour adultes, les médecins ne pratiquent plus d'examens cardiaques et respiratoires systématiques ; il faut en faire la demande », explique Carl Tilson, un jeune homme de Manchester qui vit depuis 23 ans avec la
dystrophie musculaire de Duchenne, diagnostiquée quand il avait cinq ans.
Alors que la Journée des maladies rares 2011 se penchera sur les inégalités en matière de santé rencontrées par les personnes atteintes de maladies rares, l'enquête de RDUK ne pouvait pas mieux tomber. Les expériences en matière de diagnostic, par exemple, varient énormément d'un patient à l'autre, ce qui soulève des inquiétudes quant à l'égalité d'accès aux traitements dans les différentes parties du pays. « Les résultats de l'enquête de RDUK insistent sur la nécessité de mettre en place une stratégie coordonnée au niveau national en matière de diagnostic, de traitement et de recherche sur les maladies rares. Il s'agit d'un problème très grave, auquel il faut absolument s'attaquer : il n’est pas normal que les malades et leur famille fassent l'objet d'un niveau de soin inéquitable de la part de la sécurité sociale, simplement parce qu’ils ont la malchance d'être atteints d'une maladie rare », déclare Alastair Kent, président de RDUK.
Voici quelques-uns des résultats de l'enquête :
- 46 % des patients atteints de maladies rares ayant répondu au questionnaire ont dû attendre plus d'un an pour obtenir un diagnostic définitif. Parmi eux, 20 % ont attendu plus de cinq ans et 12 % plus de dix ans
- 46 % des patients ont fait l'objet d'un diagnostic erroné
- 52 % des patients estiment ne pas avoir été suffisamment informés sur leur maladie suite au diagnostic
- 25 % des patients sont suivis dans trois ou quatre centres médicaux différents
- 45 % des patients ne sont pas au courant de l'existence d'un centre spécialisé dans leur maladie
- 57 % des patients n'ont participé à aucun projet de recherche
- 37 % des patients n'ont personne vers qui se tourner pour poser des questions sur leur maladie.
En savoir plus :Résumé des principaux résultats (en anglais)
Rapport complet (en anglais)
Cet article a été publié une première fois dans l’édition de février 2011 de la newsletter d’EURORDIS.
Auteur : Nathacha Appanah
Traducteur : Trado Verso
Photos: ©
Rare Disease UK Page created: 31/01/2011
Page last updated: 02/02/2011
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Fédérations de maladies rares
Renforcer les réseaux de patients en Europe Une fédération se définit généralement comme un groupement d’entités autonomes. Ainsi, une fédération européenne dédiée à une maladie rare regroupe des associations de patients de différents pays, atteints d’une même maladie rare ou de pathologies rares appartenant à un même groupe. « Elles se rassemblent pour renforcer leurs capacités nationales, pour parler d’une même voix au niveau européen et pour entreprendre des actions spécifiques communes à l’échelle de l’UE, explique le Directeur général d’EURORDIS Yann Le Cam. EURORDIS les encourage dans un premier temps à débuter par un réseau informel qui se concentre sur des actions concrètes. »
Aujourd’hui, de plus en plus d’associations de patients atteints de maladies rares sont tentées d’adhérer à une fédération ou d’en créer une.
«
Genespoir a été fondée en 1995. Ces 15 dernières années, nous avons beaucoup œuvré à l’échelle nationale. Mais nous sommes parvenus à la conclusion que si nous restons isolés, si nous continuons de limiter notre action à la France, il nous sera extrêmement difficile d’atteindre nos objectifs, témoigne Antoine Gliksohn, membre du conseil d’administration de Genespoir. En créant officiellement une fédération, nous espérons pouvoir monter des projets de plus grande envergure, en lien avec des programmes de recherche favorisant une meilleure intégration sociale des personnes atteintes d’albinisme en Europe. »
Comme Genespoir, toutes les associations de malades comprennent l’intérêt qu’elles ont à se regrouper sur le plan international, pour notamment :
- échanger des informations sur la maladie qui les concerne ;
- donner et recevoir conseils et soutien ;
- mutualiser les ressources ;
- améliorer leur capacité à lever des fonds et à accéder à des sources de financement à l’échelon européen ;
- parler d’une voix plus forte en faveur des malades auprès des institutions européennes ;
- encourager la recherche sur la maladie qui les concerne et soutenir des projets de recherche ;
- entrer en relation et collaborer avec des cliniciens et des chercheurs, les réseaux de patients pouvant améliorer la coopération entre professionnels ;
- travailler à des protocoles communs sur leur maladie ;
- s’organiser pour participer à un registre ou à un essai clinique ;
- être en position de force pour négocier avec les industriels ;
- soutenir d’autres associations de patients dans des pays moins développés ;
- élaborer des outils de communication et des sites Internet communs ;
- mettre en œuvre des projets communs (échanges entre jeunes, camps d’été, colloques, conférences).
Beaucoup de fédérations en devenir demandent conseil à EURORDIS. Leurs questions, multiples, concernent aussi bien leur futur statut (association, association caritative, fondation, etc.) que le pays de domiciliation le plus judicieux, la définition de leurs membres, ou encore la façon de trouver des financements au niveau européen ou d’aborder le problème des langues.
EURORDIS les invite à rejoindre le
Réseau des fédérations européennes sur les maladies rares. Celui-ci a été créé pour permettre aux différentes fédérations d’associations dédiées à une maladie spécifique d’échanger sur les meilleures pratiques, de renforcer leurs capacités, d’apprendre les unes des autres et de parler d’une voix plus forte sur la scène européenne.
À l’heure actuelle, plus de 30 fédérations européennes et internationales ont rejoint le réseau ; un représentant de chacune d’elles siège au
Conseil des fédérations européennes (CEF). Celui-ci s’est réuni à trois reprises à l’initiative d’EURORDIS, à Athènes, Bruxelles et Paris en 2009 et 2010. Lors de ces rencontres, les fédérations ont pu discuter du renforcement de leur collaboration avec les réseaux de référence européens, coordonner des activités de sensibilisation en vue de la Journée des maladies rares, mieux comprendre leur propre rôle dans le développement des médicaments et le processus réglementaire, enfin, améliorer leur accès au financement dans le cadre du Programme de santé publique de l’UE.
Tous les membres et observateurs du CEF ont été invités à participer à
Rare!Together, projet d’accompagnement financé par la Commission européenne et la fondation Medtronic. Son objectif est d’élaborer un « Guide pour la création et le développement d’une fédération européenne dédiée à une maladie rare donnée », qui a vocation à devenir le kit outils de référence pour les associations européennes désireuses de se regrouper en fédération, mais aussi pour les fédérations européennes existantes.
Ce guide se présente sous la forme d’un site Internet de type wiki, actualisé en permanence sur les thèmes suivants : créer une fédération ; gouvernance ; financement ; défense des malades et communication. Les membres les plus chevronnés du CEF font partie du comité de pilotage du projet et, comme tels, sont invités à répondre aux questions des fédérations en création et à enrichir le site.
Actuellement, Rare!Together sert à deux fédérations de patients : l’organisation européenne sur les cardiopathies congénitales
ECHDO et
l'Euro HSP. Toutes deux ont pu accélérer la fréquence de leurs rassemblements depuis le lancement du projet et ont progressé dans la création de leur fédération.
« Grâce à EURORDIS, nous avons fait un grand pas en avant afin de constituer une communauté influente de cardiopathes congénitaux en Europe, indique Hermine Nock d’ECHDO. Nous sommes désormais officiellement domiciliés en Belgique et nous avons fini de rédiger nos statuts. Il nous reste à adopter un règlement intérieur, à organiser une collecte de fonds et à ouvrir des bureaux dotés d’un secrétariat à temps partiel, pour assurer continuité et professionnalisme. Notre objectif est de soutenir de nouvelles associations et des organisations d’Europe de l’Est, et de mettre en relation patients et parents avec les experts. Sans Rare!Together, nous n’aurions pas autant avancé. »
Outre Rare!Together, le Réseau des fédérations européennes sur les maladies rares veut impliquer des associations de patients désireuses de se lancer dans l’aventure. Jusqu’à présent, des groupes de malades de différents pays dédiés au syndrome de Guillain-Barré, à la porphyrie, à la maladie de Behçet, à la sclérose tubéreuse de Bourneville et à l’albinisme ont fait part de leur intérêt et ont été invités à assister aux réunions du CEF en tant qu’observateurs. De plus, EURORDIS conseille certains d’entre eux pour la rédaction de leurs statuts et de leur règlement intérieur, en vue de leur immatriculation. On leur a également présenté les
communautés de patients en ligne, un nouveau service d’EURORDIS qui permet aux patients de se rencontrer et de partager informations et expériences avec d’autres personnes atteintes de la même maladie, via le web.
« Les mesures prises par EURORDIS pour aider les groupes de malades souhaitant s’organiser à l’échelon européen sont une initiative tout à fait brillante, qui renforce la voix des patients atteints de maladies rares à un niveau pan-européen, commente Carla Fladrowski de
TS Italie. Beaucoup des associations dédiées à la sclérose tubéreuse de Bourneville commencent à vouloir se renseigner au-delà de leur communauté et, même si nous rencontrons des problèmes dus notamment à la barrière linguistique, nous avons tous conscience qu’il est indispensable de dépasser les frontières. »
La quatrième rencontre du Conseil des fédérations européennes d’EURORDIS aura lieu en juin 2011. À cette occasion, le CEF proposera un séminaire sur les essais cliniques spécialement conçu pour les fédérations européennes. Restez à l’écoute pour en connaître la date exacte !
Pour en savoir plus :Rendez-vous sur le site Internet de
Rare!TogetherDécouvrez les
communautés EURORDIS de patients en ligneCet article a été publié une première fois dans l’édition de février 2011 de la newsletter d’EURORDIS.
Auteur : Paloma Tejada
Traducteur : Trado Verso
Photos: © EURORDIS-Sylvain Gouraud
Page created: 31/01/2011
Page last updated: 03/02/2011
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ARSBH : promouvoir l’égalité transfrontière Pour une parité de traitement, en Europe, du Spina Bifida et de l’hydrocéphalie L’attitude adoptée face aux soins de santé dans l’UE varie d’un pays à l’autre et se répercute généralement sur l’approche des maladies rares et sur leur prise en charge. L’accès aux traitements et aux services sociaux n’est pas le même pour tous, et pour les patients atteints de maladies rares, les disparités sont encore plus fortes. Non seulement ces patients et leur famille doivent se battre quotidiennement pour voir reconnaître leurs droits au sein du système de santé de leur pays, mais encore ils doivent faire face à des inégalités de traitement et de compréhension des maladies rares à l’intérieur de l’Union.
C’est en 2004 qu’Adriana Tontsch a pris conscience de la situation critique dans laquelle se trouvaient les enfants roumains atteints de Spina Bifida et d’hydrocéphalie. Adriana est née en Roumanie, mais a fui ce pays il y a 25 ans pour gagner l’Allemagne, où elle vit à présent avec son mari et leurs trois enfants. En 2005, elle a fondé l’
ARSBH (Association roumaine sur le Spina Bifida et l’hydrocéphalie,
Asociata Romina Spina bifida si Hidrocefalie). « Tout a commencé en 2003, avec Maria Savu, se souvient Adriana. Bébé, Maria avait une circonférence crânienne de 49 cm : le diagnostic d’hydrocéphalie a été posé. »
L’hydrocéphalie est une maladie qui se caractérise par une accumulation anormale de liquide céphalo-rachidien (LCR) dans les ventricles cérébraux, ce qui augmente la pression intracrânienne et fait progressivement grossir la tête. Les symptômes peuvent comprendre des convulsions, des maux de tête, des vomissements, une somnolence, le coma ou une compression du tronc cérébral mettant en jeu le pronostic vital.
L’hydrocéphalie est souvent provoquée par des cas graves de
Spina Bifida, malformation congénitale qui implique une fermeture incomplète du tube neural embryonnaire. Les vertèbres recouvrant la moelle épinière ne se forment pas correctement : leur arc postérieur reste ouvert, une partie de la moelle épinière faisant saillie par cette ouverture.
En Roumanie, les enfants atteints de cette maladie et de ses symtômes passent fréquemment pour de « vrais légumes »... On dit souvent à leurs parents qu’il n’existe aucun traitement efficace. Les parents de Maria se sont entendu dire que toute intervention chirurgicale était inutile. Lorsque la circonférence crânienne de Maria a atteint 71 cm, ses parents ont essayé de la faire traiter à Vienne, mais le coût — 12 000 euros — était prohibitif. Adriana a alors fait connaître l’histoire de Maria, levé des fonds pour l’opération, qui s’est déroulée avec succès, lorsque l’enfant avait un an, à l’Hôpital de la Donau, à Vienne.
« En Roumanie, la plupart des enfants atteints de cette maladie meurent faute de traitement. S’ils survivent, on les cache dans les orphelinats ou chez eux, explique Adriana, alors que dans d’autres pays de l’UE, les enfants bénéficient du traitement, une procédure relativement standard, sitôt le diagnostic posé. »
L’ARSBH, en collaboration avec l’association allemande
HWKR e.V., rassemble des données sur les enfants et les adultes atteints de Spina Bifida et d’hydrocéphalie. Elle achète les drains et les valves nécessaires à l’intervention, programme les opérations en collaboration avec des neurochirurgiens en Roumanie, conseille les parents et reste en contact avec les enfants opérés, en particulier ceux qui vivent en orphelinat.
Tout est financé grâce à des dons, surtout allemands. Adriana confie : « Nous avons eu la chance de participer à une émission de télévision autrichienne en 2006. Nous avons récolté suffisamment de fonds pour faire opérer de nombreux enfants. Depuis la crise financière, les dons ont reculé. Nous souhaitons attirer l’attention sur la souffrance de ces enfants roumains, mais vu la mauvaise réputation du pays dans l’UE, nous avons du mal à obtenir du soutien. »
Les plus grands obstacles à surmonter pour l’ARSBH sont l’ignorance et l’indifférence. « Les pouvoirs publics ne nous aident pas dans notre lutte. Les médecins connaissent mal ces maladies. Le système de santé roumain ne dispose pas des installations de soin et de rééducation nécessaires ; dans les hôpitaux et les orphelinats prévaut la pénurie. Malgré les efforts considérables, souvent couronnés de succès, de l’Alliance nationale roumaine pour les maladies rares (
RONARD), les personnes handicapées sont encore très largement ignorées ; améliorer leur vie n’est pas une priorité », explique encore Adriana.
Dans beaucoup d’hôpitaux publics roumains, au contraire de ce qui se passe dans le reste de l’UE, les médecins et les chirurgiens sont personnellement responsables de leur équipement. Lorsqu’un instrument tombe en panne, ils doivent trouver eux-mêmes le financement pour le réparer ou le remplacer. Cela vaut également pour les consommables médicaux tels que seringues, bandages ou aiguilles. Ceux qui le peuvent, par exemple parce qu’ils occupent un second emploi dans une clinique privée, paient parfois ce matériel indispensable sur leur propre salaire.
L’un des rôles essentiels de l’ARSBH est de fournir cet équipement. À ce jour, l’association a offert les systèmes de shunt et les autres dispositifs médicaux nécessaires pour assurer plus de 650 opérations. Elle a également permis de former six neurochirurgiens roumains aux procédures particulières utilisées pour le Spina Bifida, ce en collaboration avec la clinique de neurochirurgie de l’Université Johannes Gutenberg de Mayence, en Allemagne.
Le prochain grand chantier de l’ARSBH concerne la création d’un centre national de traitement et de convalescence des enfants atteints de Spina Bifida et d’hydrocéphalie. L’association possède le terrain, les plans de l’architecte sont prêts, mais pour le moment, il manque encore les fonds nécessaires à la construction.
« Notre objectif, c’est que tous les patients roumains atteints de Spina Bifida ou d’hydrocéphalie soient soignés et capables de mener une vie autonome. Il faut faire savoir, aux médecins comme aux familles, que ces maladies sont traitables, comme c’est le cas en Allemagne, affirme Adriana. Nous avons parcouru beaucoup de chemin, mais il reste fort à faire pour amener la Roumanie au même niveau de traitement et de soins que bien d’autres pays de l’UE. »
Cet article a été publié une première fois dans l’édition de février 2011 de la newsletter d’EURORDIS.
Auteur : Irene Palko
Traducteur : Trado Verso
Photos: © Adriana Tontsch
Page created: 31/01/2011
Page last updated: 02/02/2011